


Sommaire
Archives
Presse
Répertoire
Téléchargement
Utiles
FSU
Var
Les
élus du Var
Libertés
Moteurs
Retraites
Idées
Economie
Le
B.O.
Chiffres
Var
Var
Eco/Soc
Chiffrage
Rectorat
Attac
sur le site
Liens
SNUipp
FSU
SNES
Attac
Var-Matin
La Seyne
Var-Matin
L'Humanité
Le
Monde
Libération
Le
Mel
Voilà
Education
Altavista
Education
Yahoo
Education
Netcenter
Education
Presse-on-line.com
Luttes
étudiantes
Nous
joindre

Liens
: Gratuit sur le Net...

|
http://www.lemonde.fr/doss/0,2324,2251-1-QUO,00.html
http://www.lemonde.fr/article/0,2320,dos-2251-49751-QUO-1--,00.html
La
dernière bombe de Claude Allègre
Dans un entretien à «Paris-Match» et une tribune au «Nouvel Observateur»,
l'ancien ministre de l'éducation nationale propose, pour la première fois
publiquement, de confier la gestion des personnels aux collectivités locales.
« Le Monde » a fait réagir diverses personnalités
Mis à jour le vendredi 7 avril 2000
RADICALEMENT modernisateur, foncièrement décentralisateur et, finalement,
libéral ? Dix jours après son éviction du gouvernement, Claude Allègre
reprend l'offensive et, à sa manière, sort du bois. Dans un entretien
à Paris-Match et une tribune publiée dans Le Nouvel Observateur, jeudi
6 avril, l'ancien ministre de l'éducation nationale défend une décentralisation
totale du système éducatif.
«Toute réforme de l'éducation nationale
passe par une décentralisation et une implication plus grande des usagers
et des élus : il faut confier les écoles aux communes, les collèges aux
départements, les lycées aux régions. Personnels compris»,
assène M. Allègre. Les comptes qu'entretient ce dernier avec la politique
éducative ne sont manifestement pas soldés, et l'ancien ministre, contrairement
à l'avis de certains de ses amis, n'a pas choisi de se taire.
En incluant les personnels dans la décentralisation, Claude Allègre
relance publiquement une idée qu'il a défendue avec une partie de la droite,
contre l'avis de son entourage Rue de Grenelle. Philippe Meirieu, aujourd'hui
président de l'Institut national de recherche pédagogique (INRP), avait
ainsi rappelé ces derniers mois qu'il fallait « sortir du bras de fer
entre le ministre et les syndicats d'enseignants par le haut, c'est-à-dire
en faisant légiférer le Parlement, et non en confiant la réforme aux collectivités
locales. Les questions éducatives sont trop importantes pour être réglées
à leur niveau ».
PISTES D'EXPÉRIMENTATION
Pour leur part, les collectivités territoriales jugent tout à fait «d'actualité»
le débat ainsi ouvert par l'ancien ministre. «De la protection sociale
à l'éducation, on continue de construire des mammouths dont la réforme
devient un sujet important», note Jean-Pierre Raffarin, président
(DL) de la région Poitou-Charentes et patron de l'Association des régions
de France (ARF). « Nous ne sommes pas prêts à assumer une mission globale
d'éducation, mais une délégation républicaine, sur la base d'un contrat
et en commençant par des expérimentations », précise-t-il. Le président
de l'ARF juge impossible que les régions gèrent les enseignants ou les
rémunèrent, mais l'imagine bien pour les personnels administratifs. Il
suggère aussi des pistes d'expérimentation, telles que l'attribution aux
rectorats du statut d'établissement public. « Confier les réformes au
terrain et aux enseignants est un des enjeux des prochaines élections
», ajoute-t-il. Jean Puech, sénateur (DL) de l'Aveyron et président de
l'Association des départements de France, prône une extension du champ
de la décentralisation, notamment pour « ouvrir l'enseignement des collèges
sur leur environnement ». Il verrait même les départements récupérer les
murs des lycées, les régions s'appropriant ceux des universités. Plus
réservé, Jean-Paul Delevoye (RPR), président de l'Association des maires
de France (AMF), estime que « l'Etat doit rester maître des objectifs
pédagogiques et des moyens à mettre en oeuvre ». Les communes, qui gèrent
déjà les personnels non enseignants des écoles maternelles et primaires,
« font preuve d'une grande prudence par rapport aux demandes de l'Etat
». « Si les communes doivent assurer la gestion de l'Etat par défaut,
elles seront asphyxiées », analyse le président de l'AMF. M. Allègre s'interroge
pourtant crûment dans Le Nouvel Observateur : « Peut-on moderniser, réformer
un pays qui s'appuie si fortement sur des services publics puissants,
étatiques et centralisés ? » Il s'en prend aussi violemment aux enseignants,
déplorant une nouvelle fois que la réforme se soit heurtée « à l'action
paralysante des révolutionnaires du statu quo toujours experts dans l'agitation
de blocage par la rue ». A l'image de l'université, qui, depuis longtemps,
n'est plus, selon lui, « la république des professeurs », car ses enseignants-chercheurs
ont noué des liens « étroits » avec l'extérieur, M. Allègre aurait souhaité
que les professeurs du second degré changent. «Les enseignants qui
défilent dans les manifs sont loin d'être tous des profs charismatiques.
On en voit certains, avec leur litron de rouge...», lance-t-il
dans Paris-Match. Il déplore aussi leur absence d'ouverture d'esprit :
«Ils vivent entre eux, se marient entre eux, ne parlent que d'eux
dans leur bulletin [syndical NDLR] . Ils ressassent et veulent ressasser».
«Les établissements scolaires et les enseignants sont trop isolés. Le
service public est d'abord organisé pour eux-mêmes, à commencer par les
emplois du temps et les vacances».
MEA CULPA NUANCÉ
Le jugement est plus amène pour les instituteurs, qui, selon l'ancien
ministre, ont su s'adapter : « L'arrivée des aides-éducateurs est une
discontinuité aussi grande pour la pédagogie à l'école primaire que le
fut celle des assistants à l'université. Le travail en équipe devient
quotidien. » Au fond, l'ancien ministre pense que «beaucoup trop
d'enseignants vivent dans la peur. Peur des élèves, des nouvelles technologies,
peur des avancées de plus en plus rapides du savoir. Alors, ils comprennent
tout très mal». Sur sa méthode, M. Allègre reconnaît une seule
erreur. « Nous avons choisi de nous appuyer sur les parents et le pays
pour faire bouger les choses, persuadés que la majorité des enseignants
emboîteraient le pas si nos ambitions étaient claires. Elles ne l'ont
peut-être pas été assez. » Un mea culpa nuancé par cette conviction :
«Toutes les difficultés que j'ai rencontrées, je les avais trop
bien prévues. J'ai été piégé par l'institution». Enfin, se posant
en défenseur de la modernité, l'ancien ministre met en garde les enseignants
: « Le service public d'éducation va avoir désormais un concurrent redoutable.
Ce n'est plus l'enseignement privé sous contrat, c'est l'Internet. L'Internet
qui éduquera et contrôlera sans punir, qui aidera chacun à son rythme...
Internet va tout balayer. » Pour Claude Allègre, dont la mission était
« de préparer la France au XXIe siècle», le prof de demain « sera un guide,
un référent, une aide ».
N. G. et S. L. B.
Le Monde daté du samedi 8 avril 2000
Claude Allègre
reproche à Lionel Jospin d'avoir eu «inutilement peur»
Matignon refuse de répliquer aux «propos d'un homme libre»
Dans un documentaire que diffusera France 2, dimanche 16 avril, l'ancien
ministre évoque son action à l'éducation nationale et n'épargne pas le
premier ministre. « Il voulait quand même réussir à travers moi ce qu'il
avait raté lui-même », dit-il de Lionel Jospin. Tandis que Matignon évite
d'entrer dans une controverse avec un « homme libre », Ségolène Royal
prend ses distances avec son ancien ministre de tutelle. Mis à jour le
vendredi 14 avril 2000 CLAUDE ALLÈGRE persiste et signe. L'ex-ministre
de l'éducation nationale n'en finit pas de dénoncer les blocages qui,
selon lui, ont freiné ses réformes. Les profs, leur syndicat majoritaire
le SNES, mais aussi le premier ministre lui-même. Dans un entretien enregistré
le 5 avril et qui sera diffusé dimanche 16 avril sur France 2 ( Claude
Allègre, les réformes dans la tourmente, à 23 h 05), M. Allègre condamne
sans appel l'attitude de Lionel Jospin à son égard. Commentant son éviction
du gouvernement, il lance : «J'ai le sentiment d'un premier ministre
qui a eu peur. Qui a inutilement eu peur». Il n'est pas plus tendre
pour son « ami de quarante ans » lorsqu'il évoque les moyens que ce dernier
a mis à sa disposition. « Il m'a donné peu d'argent et il voulait quand
même réussir à travers moi ce qu'il avait raté lui-même [entre 1988 et
1992]. » Puis vient le coup de grâce. «Jospin a mis beaucoup d'argent
dans l'éducation nationale et n'a pas fait beaucoup de réformes»,
juge l'ancien conseiller spécial, qui se désolidarise ainsi, pour la première
fois aussi clairement, du bilan éducatif de M. Jospin. Pour l'heure, juge-t-il,
«l' éducation nationale, c'est le Gosplan qui uniformise et démoralise
les meilleurs».
« Pouce, Claude
Allègre ! », a répliqué Ségolène Royal dans un point de vue publié
par le Nouvel Observateur (daté 13-19 avril). L'ex-ministre déléguée à
l'enseignement scolaire, aujourd'hui chargée de la famille et de l'enfance,
sort de sa réserve. « Diaboliser les enseignants ou leurs organisations
syndicales ne fut pas ma manière », explique-t-elle, en désavouant son
collègue. Rendant « hommage aux équipes pédagogiques qui s'investissent
bien au-delà du minimum professionnel requis », la ministre affiche sa
différence : « Je ne peux laisser penser que j'aurais adhéré à l'étrange
projet de s'appuyer sur les parents contre les enseignants pour faire
bouger l'école. » Face aux attaques en règle formulées par l'ancien ministre,
Mme Royal résume le personnage sans ambages. « Pour réformer, il faut
être modeste. Le problème avec Claude, c'est qu'il a trop de certitudes
», explique-t-elle dans Paris-Match du 20 avril . Se plaçant du côté des
professeurs, la ministre ajoute : « J'ai ressenti ses propos comme blessants
et injustes. »
« REGARD ATTENDRI
»
Dans l'entourage de M. Allègre, rares sont ceux qui acceptent de commenter
l'offensive de l'ancien ministre. « Plusieurs proches lui ont demandé
d'arrêter ses attaques qui ne servent à rien et qui mettent ceux qui ont
travaillé avec lui en difficulté », assure un ancien conseiller. « Particulièrement
blessé par ce qu'il a vécu, il règle ses comptes et dérape mais cela ne
nous aide pas à gérer l'après-Allègre », ajoute-t-il. En attaquant avec
une sévérité jamais égalée les enseignants et le SNES, M. Allègre affiche
« son vrai tempérament », considère un autre membre de son entourage.
« Les propos qu'il tient aujourd'hui étaient les mêmes qu'il tenait en
privé au ministère », affirme-t-il. « Maintenant il se lâche, c'est sa
nature propre qui prend le dessus », témoigne ce bon connaisseur de la
Rue de Grenelle qui s'étonne que « son ami de quarante ans ne lui demande
pas de se taire ». En jouant la carte de l'offensive tous azimuts, l'ancien
ministre « s'enfonce un peu plus vis-à-vis des profs mais aussi de l'opinion
publique et creuse l'écart avec la personnalité de son successeur », garantit
ce même proche. « Jack Lang passera davantage encore pour un homme de
dialogue », estime-t-il. L' « ami de quarante ans », justement, ne dit
rien. M. Jospin, affirme un de ses conseillers, pose « un regard attendri
» sur M. Allègre. Les critiques répétées et de plus en plus acides que
l'ancien ministre porte sur le chef du gouvernement n'ont officiellement
suscité que ce constat de la part de M. Jospin : « Claude part et sort
comme il est entré. » C'est-à-dire tonitruant, provocateur. Quant à ses
anciens collègues ministres, ils ne se montrent guère plus bavards. «
Bien sûr », affirment certains d'entre eux, ils lui ont téléphoné à plusieurs
reprises, ils vont l'inviter à dîner, dès qu'il sera rentré à Paris. «
On ne va pas le laisser tomber », confie ainsi Daniel Vaillant, ministre
chargé des relations avec le Parlement. A mots couverts, d'autres évoquent
la « réaction compréhensible d'un bonhomme qui parle avec ses tripes,
[qui est] dans une phase de haute déprime ».
PAS DE MESSAGE DE MATIGNON
Dans l'entourage du premier ministre, on assure en tout cas qu' « aucun
message ne lui a été transmis » pour lui demander de faire silence. Discrétion,
pudeur, liées aux relations d'amitié étroite entre M. Jospin et M. Allègre
? Certes. Mais auxquelles, à Matignon, pour couper court à toutes les
questions, on ajoute un commentaire cinglant : « Claude Allègre est un
ancien ministre de l'éducation nationale, un scientifique de haut niveau,
une personnalité forte, un homme libre, qui s'exprime librement. On ne
commente pas les propos d'un homme libre. » La page est tournée.
Sandrine Blanchard et Pascale Robert-Diard Le Monde
daté du samedi 15 avril 2000

|